Trouver un tourneur : une étape obligée pour votre groupe de musique ?

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Vous sortez de votre répétition gonflé à bloc, vous savez que votre dernier morceau déchire tout, et qu’il vient apporter le supplément d’énergie / d’âme / d’originalité qui manquait à votre spectacle. Vous faites quelques dates ici et là, surtout autour de chez vous, et vous voudriez passer à la vitesse supérieure. Vous rêvez d’intermittence ? De partager votre musique à votre public et à vos futurs fans ? Vous avez peut-être besoin de trouver un tourneur, ou un booker, et vous ne savez pas comment vous y prendre ? Accrochez-vous, car j’en ai rencontré trois qui m’ont régalé en me dévoilant toutes les ficelles. Bertrand Mougeot, de Limouzart, par exemple, a propulsé Gauvain Sers dans les hauteurs qu’on lui connaît aujourd’hui. Fred Lomey, de Melodyn, compte dans son catalogue les deux monuments français du dub, Zenzile et Hightone, et il est intervenant dans la formation de Cédric Tilèpe, l’animateur du blog de très haute volée “Les ateliers de Cédric”, sur les métiers de la musique. Enfin, Philippe Labrousse, de Kanope Prod, gère notamment les tournées de Frédéric Zeitoun, Mes Souliers Sont Rouges, ou encore Téo. Tous les trois sont installés depuis des années, ont travaillé avec des centaines d’artistes, et je vais tout vous révéler de ce qu’ils m’ont dit !

Tourneurs, bookers : quel entourage de l’artiste pour le live ?

Quelques précisions sur les appellations

Définissons un peu les termes pour y voir plus clair. Dans le panel des gens qui peuvent vous aider à faire plus de dates, nous allons nous intéresser à trois métiers en particulier.

  • Le booker : il est là pour faire des placements d’artistes, c’est un peu un apporteur d’affaires. Il passe des appels et envoie des mails pour placer un groupe dans une salle, il fonctionne à la com’ sur chaque date trouvée.
  • Le tourneur : il organise non pas une date par ci par là, mais des tournées entières, il est lié à l’artiste par un contrat.
  • Le producteur live : il est missionné pour placer des artistes et prendre des risques financiers (budget plateau correct, location de la salle, billetterie), il perd de l’argent si cela ne fonctionne pas ; ajoute au tourneur une activité de développement d’artiste, monte le spectacle et la tournée.

Ici nous allons essentiellement parler du tourneur, mais la plupart des infos seront également valables pour les deux autres catégories.

Comment se passe le travail avec un tourneur ?

La signature avec un tourneur peut être une étape importante pour les groupes de musique souhaitant se professionnaliser. Le tourneur s’occupe de la gestion de la tournée du groupe, de la recherche de dates de concert, de la négociation des contrats et de la logistique de la tournée.
Cependant, la signature avec un tourneur peut aussi présenter des limites et des difficultés. Tout d’abord, il peut être difficile pour un groupe de musique amateur de trouver un tourneur qui soit intéressé par leur musique. Ensuite, le tourneur prend généralement une commission sur les revenus du groupe, ce qui peut réduire leurs gains potentiels. Enfin, travailler avec un tourneur peut impliquer des compromis artistiques, car le tourneur peut avoir son propre agenda et ses propres idées quant à la direction artistique du groupe.
Si vous souhaitez trouver vos concerts sans l’aide d’un professionnel, ou que vous ne trouvez pas de prestataire qui vous convient (ou à qui vous convenez), je vous conseille vivement la lecture de notre article sur la recherche de dates de concert !
Il est donc important de peser le pour et le contre avant de signer avec un tourneur, et de s’assurer que les termes du contrat sont clairs et avantageux pour le groupe. Le mieux est de rechercher plusieurs options et de les comparer pour prendre la décision la plus appropriée pour votre groupe.

Les tourneurs en France

Il y a environ 1000 tourneurs en France, répartis en 2 catégories.

10 à 15 énormes tourneurs-producteurs de spectacle

On n’en parlera pas car on ne va pas les chercher ! C’est eux qui viennent quand ça sent le pognon… D’autant plus que si un artiste est recruté sur un coup de chance mais qu’il n’est pas prêt (voir plus bas), il ne va souvent pas se passer grand chose. Il vaut parfois mieux être la star d’un petit catalogue que le petit d’un catalogue de stars…
Voici néanmoins une liste non exhaustive de quelques-uns des plus importants tourneurs français :

Les tourneurs de musique en petite et moyenne structure

C’est notre sujet ! S’ils sont indéniablement de taille plus modeste, ils peuvent aussi avoir une activité de producteur de tournées de spectacles. Dans un sens, ils contribuent à la production d’artistes. Contrairement au booker, le tourneur ne se contente pas de trouver des dates de concerts, il produit ses artistes, en montant leurs spectacles et leurs tournées. Il encadre la création du show, le produit, le finance, pour ensuite le diffuser. Si besoin, il peut essayer de trouver un manager pour l’artiste, de lui constituer un entourage, c’est-à-dire une équipe de professionnels dévoués. La plupart des tourneurs sont spécialisés dans un style de zic précis, et ils ont généralement un petit catalogue (une dizaine d’artistes) pour un à trois bookers.

Trouver un tourneur : les pré-requis

Le plus important est d’être moteur de votre projet ! Vous ne pouvez pas vous contenter de faire de la musique dans votre coin, aussi bonne soit-elle. Vous devez vous montrer presque aussi bon communicant que musicien, et savoir vous vendre.

Soyez capable de garantir la qualité de votre musique

Évidemment, quand on parle de musique, le principal est que votre projet révèle vos qualités artistiques… Désolé d’enfoncer des portes ouvertes mais il est évident que vous devez composer des morceaux originaux, les jouer correctement, être à l’aise sur scène, avoir un set qui plaît, et développer une identité visuelle et sonore propre. Ce ne sera pas la peine d’inviter un tourneur professionnel à votre local de répétition si vous n’avez encore rien enregistré. Mettez à disposition sur le web de l’audio, des vidéos, et ces médias seront votre meilleure carte de visite. Quand vous démarcherez, pensez à utiliser en priorité vos créations les plus récentes, car les tourneurs préfèrent souvent écouter des trucs pas encore sortis, pour se projeter avec vous dans votre futur spectacle. Cette coopération doit permettre de travailler sur l’avenir plutôt que sur le passé.

L’importance de bien s’entourer

Pour approcher des pros, rien ne vaut d’en être un soi-même, ou d’en avoir sous la main. C’est pourquoi vous mettrez des chances de votre côté en vous dotant d’un entourage : manager, booker, éditeur, maison de disque, attaché de presse, community manager… Ces personnes seront davantage crédibles aux yeux de votre interlocuteur, et elles pourront également vous trouver ou vous fournir des recommandations. Évidemment, vous ne pourrez jamais avoir tout le package d’un coup, mais si vous ne connaissez rien qu’un ami qui est déjà un peu dans le circuit, vous aurez déjà un peu plus de chances d’être entendu. Pour cela, tournez-vous vers les les structures locales que vous connaissez (associations, salles, locaux de répétition), et questionnez d’autres musiciens plus avancés que vous.

Trouvez des dates par vous-mêmes

N’attendez pas d’être invité dans le circuit, rentrez-y par la petite porte. Vous faites probablement déjà quelques concerts, alors continuez d’en chercher en élargissant petit à petit votre champ d’action. Démarchez les salles en étant organisé et patient, comme indiqué dans cet article sur la recherche de dates. Participez à des tremplins, comme les Inouïs (celui du Printemps de Bourges) ou aux Transmusicales de Rennes. Les événements locaux de moindre envergure ne sont pas à délaisser, pourvu qu’ils vous permettent de vous produire sur scène. Un tourneur sera plus enclin à travailler avec vous si vous avez déjà une actualité et une présence.

Faites-vous connaître sur internet

Aujourd’hui, le plus efficace est de développer une communauté sur les réseaux sociaux. C’est là que vous pouvez toucher la majeure partie de votre public, car c’est un moyen de vous rendre visible 24 h/24 sur toute la terre. Qui dit mieux ? Vous pourrez y présenter vos œuvres, les coulisses de la création, échanger avec votre public pour l’engager. Si tout se passe bien, vous allez construire puis fidéliser une audience. Si vous voulez en savoir plus, je vous conseille de bien connaître et utiliser chaque réseau. Soyez sûr que si votre page fédère plusieurs dizaines de milliers d’abonnés, la plupart des tourneurs vous accueilleront avec un grand sourire.

Préparez votre pitch

Ici nous parlerons de quoi envoyer, et à qui.

  • Cibler les structures : votre proposition doit être cohérente avec le catalogue du tourneur. Si ce dernier est spécialisé dans la bossa nova, votre mail de proposition concernant votre groupe de hard rock ne sera probablement pas lu… Mais ça ne s’arrête pas là, car il faut coller avec le style sans faire concurrence aux autres artistes du roster (le catalogue du tourneur). Il va donc falloir que votre musique soit adaptée, mais quand même suffisamment originale. Une seule exception à ce principe : si un artiste termine une tournée et / ou s’apprête à faire une pause, ça peut être pertinent d’essayer de le remplacer. Pour cela, allez chercher des infos sur les groupes déjà signés, et écoutez les.
  • Soigner votre proposition : faites un topo sur votre projet en soignant votre expression, mentionnez votre actu et vos objectifs, et ajoutez quelques liens vers de l’audio et / ou de la vidéo. Si vous le pouvez, précisez des infos sur votre public (nombre moyen, sociologie), ainsi que votre expérience scénique. Le mieux est toujours d’écrire “de la part de…”, car si vous avez une connaissance de confiance en commun, le tourneur sera plus attentif à votre message. Le hack ultime pour faire la meilleure impression, c’est d’être coopté par un label, ou par un artiste du catalogue, mais ce n’est pas à la portée de tout le monde…
  • Avoir le matériel professionnel prêt : Si le tourneur est intéressé, il demandera souvent un dossier de presse, une fiche technique et une maquette audio ou vidéo. Les musiciens doivent donc veiller à préparer ces documents à l’avance.

Ayez de la chance ! Ou de l’actu…

Vous ne l’aviez pas vu venir, celle-là ! Mais je suis sûr que vous le saviez déjà, car c’est malheureusement vrai dans bien des domaines : le facteur chance a une importance démesurée dans la vie, du moins pour les êtres rationnels que nous sommes. Cela peut être frustrant, mais c’est comme ça. Mettez-vous à la place d’un tourneur deux minutes et vous comprendrez mieux. De manière générale, ils reçoivent 5 à 20 propositions par jour, et pourtant ils recrutent peu de nouveaux artistes. Le truc c’est que leurs journées ne font pas plus de 24 heures, donc leur attention est limitée par leur temps de travail disponible pour chaque projet… S’ils sont dans le jus, ils n’ouvriront même pas votre mail, donc avril et mai, par exemple, on oublie, car ces mois sont généralement très chargés par la mise au point des derniers détails pour les tournées estivales. Et certains n’ouvriront jamais vos messages, ce sont ceux qui préfèrent démarcher les artistes intéressants eux-mêmes (un peu comme les grosses structures mentionnées plus haut). C’est eux qui se mettent au radar quand ils se sentent disponibles pour accueillir un nouveau projet. Ils font de la veille, ils écoutent les sorties, ils regardent les vitrines, se tiennent au courant des découvertes, ils sont à l’écoute des propositions faites par d’autres professionnels, et si vous êtes susceptibles de les intéresser, c’est eux qui viendront vers vous. D’où la nécessité de savoir exister par vous-même. Une méthode fiable ne reposant jamais sur la chance, il sera possible d’éviter l’écueil du “ce n’est pas le bon moment” en multipliant vos sollicitations sur l’année. Tentez votre chance plusieurs fois, permettez-vous quelques relances non invasives ou désagréables, soyez pro, quoi ! Une actu est toujours l’occasion de recontacter les gens, donc ayez de l’actu.

Devez-vous avoir un tourneur ?

Un tourneur défend votre musique car elle lui plait énormément, il va se décarcasser pour vous donner un maximum de visibilité et de travail, et pourtant cela ne convient pas à tous les groupes.

Vous en avez besoin si…

  • Vous avez besoin d’une structure qui s’occupe du contrat de vente et du contrat de cession (= du cachet), et vous ne voulez/pouvez pas passer par une association.
  • Vous écumez les salles et visez de gros festivals. L’industrie musicale squatte les programmations des gros événements estivaux, qui sont de moins en moins ouverts aux découvertes et aux artistes amateurs. C’est tellement vrai que même les tourneurs de taille moyenne n’arrivent pas non plus à y placer leurs artistes. Il vous faudra donc chercher des gros poissons !
  • Vous êtes prêt à céder 20 % du CA de la tournée et 10 % des subventions obtenues (la part moyenne du tourneur), et parfois un pourcentage sur les bénéfices de la tournée. Certains voient cela comme un manque à gagner, d’autres comme un coût d’opportunité : il vaut mieux gagner 80 % de quelque chose que 100 % de rien du tout…

Vous devriez vous en passer si …

  • Vous jouez de la musique modeste, si vous jouez des reprises, ou des compositions manquant d’originalité ou de virtuosité, par exemple. Mon intention n’est pas du tout de rabaisser d’honnêtes musiciens qui font tout à fait le taf. Mais de parole de tourneur, pour des groupes qui écument les campings, les bars à concert ou les bords de plage avec des reprises, impliquer un tourneur ne va pas apporter une réelle plus-value au projet. Il sera plus rentable de continuer comme vous faites déjà, ou de vous rapprocher d’un booker pour vous aider à compléter vos tournées.
  • Vous jouez dans des petites salles, sur des dates à petit budget. Admettons que vous trouviez la date vous-même : si vous êtes intermittent, vous encaissez un Guso, si vous ne l’êtes pas, vous facturez avec votre asso. Dans la plupart des cas, l’organisateur va débourser 500 à 800 euros. Maintenant, faisons le calcul si vous passez par un tourneur : ce dernier va ajouter à votre rémunération les charges, les frais de compta, de juriste pour les contrats, les frais de sa structure, si bien que ça va coûter 1500 à 1800 euros pour l’acheteur donc ce sera souvent trop cher, et la date ne sera pas programmée…
  • Votre tourneur vous propose de payer pour intégrer une tournée. Ce genre de prestataire a souvent des arguments très clairs pour expliquer son fonctionnement, et on finit par voir ça comme un investissement nécessaire, et logique, mais fuyez ! Le plus souvent, il n’en ressortira pas grand chose, à part l’argent, de votre poche…

Si vous pensez en être arrivé à cette étape de devoir trouver un tourneur pour poursuivre votre activité musicale dans les meilleures conditions, il existe de plus en plus de petits tourneurs indépendants que vous pourrez trouver facilement sur internet via un moteur de recherche ou des réseaux sociaux. Il est donc essentiel de mener des recherches approfondies et de bien réfléchir avant de choisir un tourneur. Et si vous vous posez encore des questions, contactez-moi et je pourrai vous aider à résoudre votre problème.

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